Le Fonds Dufroid
Le Fonds Dufroid, constitué dès 1965, est une véritable encyclopédie viennoise avec plus de 60 000 pages manuscrites. Compilées en 388 classeurs par Roger Dufroid, ces fiches couvrent des sujets très variés : biographies de Viennois, généalogies, histoire des rues, histoire des monuments, histoire militaire, histoire du cinéma viennois, histoire des industries, des commerces et des services, biographies d’artistes, etc.
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- Le fonds est composé de 388 classeurs contenant chacun une centaine de fiches manuscrites. Les classeurs sont référencés sous les cotes MD 1 à MD 388.
- Cliquez sur les différentes thématiques pour connaître les contenus des classeurs concernés. Exemple : cliquez sur « Biographies » = 45 classeurs numérotés de MD 1 à MD 45 = en cliquant sur l’un ou l’autre classeur, vous aurez le détail dans la fenêtre « Mot-clé » de chaque classeur. Chaque mot-clé correspond à une fiche d’une ou plusieurs pages.
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Pour toute question concernant la recherche du fonds Dufroid, n’hésitez pas à prendre contact avec le responsable du fonds patrimonial qui vous guidera dans votre démarche.
Roger Dufroid, l'historien de Vienne
Biographie :
Roger Dufroid (1928-2018) est né à-Sainte Colombe. Il a exercé plusieurs professions avant de travailler de nuit à l’hôpital de Vienne en tant que conducteur de chaudière. Cet emploi nocturne lui permettait de pouvoir lire tous les ouvrages sur l’histoire de Vienne qu’il pouvait se procurer. Il entreprit ainsi de prendre des notes manuscrites sur des fiches rangées dans des classeurs thématiques. Petit à petit, Roger Dufroid devint un chercheur acharné et rigoureux, publiant de nombreux articles et livres sur l’histoire de Vienne. En 1998 il fit don à la bibliothèque de Vienne du fruit de plusieurs décennies de recherches : plus de 300 classeurs contenant 60 000 pages manuscrites. Il est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands historiens viennois.
Hommage à Roger Dufroid (1928-2018)
par Bruno Mayorgas, responsable du fonds patrimonial de la Médiathèque de Vienne
article publié en 2021 dans le "Bulletin de la Société des Amis de Vienne" n°116, fascicule 3.
J'ai rencontré pour la première fois Roger Dufroid en 1998. Cette rencontre a été directement liée au début de ma carrière professionnelle. L'une de mes premières missions consistait à réceptionner le don que Roger Dufroid s'apprêtait à faire à la Ville de Vienne, un ensemble de notes manuscrites accumulées pendant plus de trente années de recherches. J'étais donc amené à le rencontrer fréquemment dans ce contexte.
J'ai été d'emblée marqué par deux impressions : la rigueur et l'érudition dont faisait preuve Roger Dufroid. A son contact, j'ai rapidement mesuré l'étendue de mes lacunes sur l'histoire de Vienne. Je me devais de rapidement combler ce retard afin de pouvoir comprendre les enjeux de son don. Il me semblait que les sphères dans lesquelles il évoluait étaient inaccessibles. Il m'a fallu plusieurs années d'études sur l'histoire viennoise avant d'être, pour Roger Dufroid, un interlocuteur efficace.
Du conducteur de chaudière...
Petit à petit une relation particulière dans un cadre professionnel, s'est construite. Elle m'offrit l'opportunité d'en savoir plus sur la passion dévorante qui animait Roger Dufroid. Au cours de nos échanges, il a souvent évoqué la naissance de cette passion pour l'histoire de Vienne, et ses débuts de chercheur.
Né à Sainte-Colombe dans une famille modeste, il n'a pas eu l'opportunité de faire des études. Après avoir exercé plusieurs professions, il effectua une carrière de conducteur de chaudière à l'hôpital de Vienne. Son travail consistait à en surveiller le fonctionnement de nuit. Cette tâche nocturne et sédentaire lui procura, avec l'accord de sa hiérarchie, l'occasion de se plonger dans la lecture de nombreux ouvrages sur l'histoire de Vienne et d'autres sujets. C'est ainsi que commença son activité d'érudit local.
Au fil de ses lectures il éprouva le besoin de rédiger des notes qui furent tout d'abord des comptes rendus de lectures. Cet ensemble avait besoin d'être structuré. Roger Dufroid décida de classer ses fiches par sujets. Ainsi se poursuivit son travail de collecte et de rédaction qui devint plus tard une encyclopédie. En parallèle il publia de nombreux articles dans des revues locales, puis des monographies, souvent à compte d'auteur. Cette activité ne faiblit jamais.
En 1998, il était déjà retraité. Il pouvait consacrer tout son temps à la recherche, à la rédaction de ses fameuses fiches manuscrites sur l'histoire de Vienne et des Viennois. Il n'a d'ailleurs jamais cessé de les écrire ou de les réécrire.
En parcourant ce travail monumental, 60 000 pages manuscrites rassemblées dans des classeurs à anneaux de petit format, on est frappé par le caractère exceptionnel de l'ensemble. Ce que l'on appelle désormais à la Médiathèque de Vienne, le "fonds Roger Dufroid", est une véritable encyclopédie. Roger Dufroid, bien qu'autodidacte, a travaillé en historien. Il cite les sources utilisées pour constituer ses fiches thématiques. Il multiplie les références bibliographiques. Cette démarche scientifique rend son travail utile au plus grand nombre. La remarquable rigueur dont il a fait preuve permet à la fois de mieux connaitre l'histoire locale et d'approfondir la connaissance que nous avons sur les sources disponibles. Roger Dufroid ne s'est pas contenté de consulter ce qui était seulement à proximité, c'est-à-dire les fonds de la bibliothèque municipale et ceux des archives communales. Il a également utilisé les fonds des grandes bibliothèques, en particulier ceux de Lyon et de Grenoble, passé du temps aux Archives départementales de l'Isère et du Rhône.
... A l'historien de référence...
Le fonds Dufroid est aujourd'hui incontournable pour répondre aux demandes des chercheurs qui viennent consulter le fonds patrimonial de la Médiathèque. Depuis 1998 j'ai été chargé de constituer un index informatisé de toutes les fiches réalisées par Roger Dufroid. En saisissant un mot clé dans une base de données, il est possible de retrouver en quelques secondes la référence d'une fiche. Les multiples renvois bibliographiques qui accompagnent les notices de Roger Dufroid permettent de rebondir sur le fonds patrimonial de la Médiathèque et de compléter ses recherches.
Cet ensemble documentaire est conservé dans la réserve du fonds patrimonial de la Médiathèque. Les classeurs (plus de 300) dans lesquels sont insérées les fiches manuscrites sont rangés dans des rayonnages adaptés. Les conditions de stockage sont bonnes : la réserve est équipée pour assurer les meilleures conditions de conservation. Cependant une préoccupation demeure : il n'existe aucune copie de cet ensemble documentaire. Numériser l'ensemble des fiches permettrait de sauvegarder ce travail de toute une vie. Le projet est à l'étude.
Les fiches manuscrites de Roger Dufroid sont utilisées très régulièrement par les chercheurs ou par les services de la Ville de Vienne.
En plus de ses classeurs, il a donné de très nombreux documents à la médiathèque : des imprimés et des manuscrits sur l'histoire locale, des dossiers documentaires, des "éphémères" (documents produits pour une occasion unique : affiches, cartes de membres d'associations, cartons d'invitation, etc.) Cet apport a considérablement enrichi le fonds local de la médiathèque.
L'utilisation systématique du fonds Dufroid, notamment de la part des universitaires qui reconnaissent aujourd'hui la pertinence de son travail, est une revanche pour l'auteur.
Certains d'entre eux l'ont parfois dédaigné de son vivant car son érudition n'était pas le fruit d'un parcours classique. Pourtant Roger Dufroid relevait régulièrement des erreurs dans les écrits de ses détracteurs et s'offusquait de leur manque de rigueur. Je retiens une phrase qu'il répétait souvent : "avant d'écrire quelque chose il faut croiser plusieurs sources". Il avait appris cela de ses maîtres, les historiens viennois Pierre Cavard et Charles Jaillet.
Ceux qui l'ont connu peuvent témoigner de ses colères provoquées par la lecture d'un texte qui ne citait pas ses sources ou quand il voyait jeter un document qui aurait pu être précieux. Certains diront qu'il ne mâchait ses mots. Il pouvait faire preuve de virulence. Parallèlement il offrait bien volontiers son aide aux chercheurs qui en faisaient la demande. Bienveillant, ne comptant pas le temps passé, il a débloqué bien des situations. Il permit à de nombreuses recherches d'aboutir.
... Une singulière figure locale !
Enfin, Roger Dufroid était un anticonformiste à multiples facettes. Sa passion pour l'histoire locale était connue. Mais l'homme s'était également investi dans d'autres passions : la photographie, la bibliophilie, les arts (en particulier les peintres locaux), l'histoire du cinéma (il fut projectionniste à Vienne), la radiesthésie, et surtout la théologie.
Il avait réalisé une synopse (comparaison des quatre évangiles) en travaillant sur les traductions en araméen, grec, latin, et dans les langues vernaculaires. Ce travail avait été validé par une faculté de théologie. Constatant que les textes des évangiles et leurs traductions comportaient d'importantes différences, voire des contresens, il fut amené à s'interroger sur sa propre foi. Il continua d'étudier d'autres religions pour finalement s'en écarter et adhérer à la libre-pensée. Il en fut l'un des plus ardents défenseurs.
Dans le domaine de la politique, comme de la religion, sa démarche consista à s'intéresser aux différents mouvements pour finalement devenir apolitique. Il tenait absolument à se tenir à l'écart des manifestations publiques ou des mondanités qui auraient pu l'associer à tel ou tel parti. C'est aussi probablement la raison pour laquelle il resta dans l'ombre. Paradoxalement, je l'ai souvent entendu exprimer du désarroi face à ce qu'il considérait comme un manque d'intérêt pour son travail d'historien. A ce propos, il faut rappeler le rôle déterminant que joua Eliane Renard alors qu'elle était directrice des bibliothèques de Vienne. Convaincue de l'intérêt des travaux de Roger Dufroid, elle mit tout en oeuvre pour faciliter le don de ses classeurs à la ville de Vienne.
Parmi tous les souvenirs que je garde de mes collaborations avec lui, un me marque en particulier. Il y a quelques années, Roger Dufroid avait fait l'objet d'un documentaire filmé pour le magazine "Le milieu du Rhône". Le réalisateur avait su saisir en gros plan un geste que j'avais vu Roger Dufroid souvent reproduire. Quand il s'impatientait de trouver une information dans un document, il agitait ses lunettes dans sa main.
Cette image me revient fréquemment quand j'ouvre l'un de ses classeurs, ou que l'on me parle de lui.
Avec la disparition de Roger Dufroid, Vienne a perdu sans nul doute l'un de ses plus grands historiens.
Crédits photographiques :
- Classeurs de Roger Dufroid dans la réserve du fonds patrimonial : Médiathèque de Vienne (2021)
- Portrait de Roger Dufroid : Delphine Rioult (2014)